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des bouts de Marionette
3 novembre 2007

Geisha

Un extrait de Geisha, de Arthur Golden.
Un bouquin génial qui m'a donné envie d'en savoir davantage sur les moeurs et coutumes du pays du Soleil Levant. Je l'ai lu en trois jours.

Discussion entre Mameha-san et Sayuri, qui apprend le métier de Geisha.

  " - Mameha-san ! m'exclamais-je. Si j'avais le pouvoir de faire évanouir un homme, il y a longtemps que je le saurais !
    - Ce qui m'étonne, c'est que tu ne l'aies pas encore réalisé. Je te propose une chose : tu feras tes débuts quand il te suffira d'un battement de cils pour qu'un homme s'arrête dans la rue.
    J'étais si impatiente de faire mes débuts ! Mameha m'aurait dit, fais tomber un arbre rien qu'en le regardant, j'aurais essayé. Voudrait-elle bien m'accompagner, lorsque je testerais mon regard sur les hommes ? Elle accepta avec joie. Le premier qui passa était un maigre vieillard. On aurait dit un kimono rempli d'os. Il remontait la rue à pas lents, à l'aide d'une canne. Ses lunettes étaient si crasseuses, que cela ne m'eût pas surprise de le voir rentrer dans un mur. Il ne me remarqua pas. Nous continuâmes vers Shijo Avenue. Bientôt parurent deux hommes d'affaires en complet veston, mais je n'eus pas plus d'effet sur eux. Ils durent reconnaître Mameha, ou juger qu'elle était plus jolie que moi, car ils ne la quittèrent pas des yeux.
    J'allais renoncer, quand je vis un garçon livreur d'une vingtaine d'années. Il portait un plateau avec des boîtes en bambou empilées dessus. A cette époque, maints restaurants de Gion livraient des repas. L'après-midi, ils envoyaient un garçon récupérer les boîtes vides. Habituellement, le livreur mettait les boîtes dans une caisse, qu'il portait sous le bras, ou les amarrait sur le porte-bagages de sa bicyclette. Je me demandais pourquoi ce jeune trimballait ces boîtes sur un plateau.
    Il était à une centaine de mètres de moi. Mameha le regardait. Elle me dit :
    - Fais-lui renverser son plateau.
    Avant que j'aie pu savoir si elle plaisantait ou pas, elle avait disparu dans une rue transversale.
    Je ne pense pas qu'une fille de quatorze ans - ni même une femme - puisse faire renverser quelque chose à un jeune homme rien qu'en le regardant. On voit ce genre de scène au cinéma, et dans les romans. J'aurais renoncé d'emblée, si je n'avais pas remarqué deux choses. D'une part, le jeune homme était déjà en train de me reluquer, comme un chat affamé regarde une souris. Et puis cette rue, contrairement à la plupart des rues de Gion, avait un trottoir. Le livreur marchait sur la chaussée, près du trottoir. Si je réussissais à le faire dévier de sa trajectoire, il pourrait trébucher sur le trottoir et faire tomber son plateau. Je commençai par baisser les yeux. Puis j'essayai de faire ce regard furtif que Mameha avait testé sur moi. Je levai les yeux un bref instant sur le jeune homme, pour les détourner aussitôt. A présent, le livreur me regardait avec une telle concupiscence qu'il en avait probablement oublié son plateau, et le trottoir. Quand nous fûmes à quelques mètres l'un de l'autre, je déviais légèrement vers lui. Il ne pouvait plus passer à côté de moi sans monter sur le trottoir. Je le regardai droit dans les yeux. Il s'écarta pour me laisser le passage. Ses pieds butèrent contre le bord du trottoir, comme je l'avais espéré. Il s'écroula par terre. Les boîtes s'éparpillèrent sur le trottoir. Je ne pus m'empêcher de rire ! Le jeune homme rit aussi, ce qui me ravit. Je m'aidai à ramasser ses boîtes et lui adressai un petit sourire. Il me salua - aucun homme ne s'était jamais incliné si bas devant moi - puis il passa son chemin.
    Je retrouvai Mameha quelques instant plus tard. Elle avait tout vu.
    - Je crois que tu es prête à faire tes débuts, dit-elle."

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Commentaires
M
Oui j'avais entendu parler de plusieurs bouquins là dessus, effectivement. Mais peut-être pas pour tout de suite... je préfère d'abord oublier un peu celui-ci avant!
M
Effectivement, un bouquin super, mais très romancé malgré tout. Dans la même veine, il existe la biographie de la véritable geisha qui a servi de base à Arthur Golden pour son roman, "Ma vie de geisha" de Mineko Iwasaki. J'avais également trouvé "Mémoires d'une geisha" de Inoue Yuki très intéressant.
M
eh alors quoi, cheffe, on s'laisse impressionner?? Allons...
A
C'est du propre! Et moi qui venais ici en copine, je tombe sur des cochonneries stupreuses et affriolantes! Merde mon rimmel...<br /> ;-p
M
C'est vrai pour ce que cet apprentissage est celui de la beauté qui n'est pas intègre au visage qui le porte. Je vois ce que tu veux dire. Mais on voit dans ce bouquin qu'une Geisha, aussi planquée peut-elle être derrière ses apprêts, a une personnalité bien perçue de ses hôtes. Sans quoi le choix des Geishas pour une soirée serait peu important... et les "employeurs" réguliers des Geishas les connaissent plutôt bien. Après, pour ce que tu dis des kamikazes, je suis d'accord.
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