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des bouts de Marionette
18 octobre 2007

Où l'on parle du désespoir et d'énergie vitale (3/3)

(Ce billet vient à la suite de celui-ci, et c'est la fin)

    Pour avoir passé un bon moment à me triturer l'esprit sur ce qui me retenait ici-bas sans trouver de bonne raison, je pense avoir goûté suffisemment au désespoir pour le reconnaître à des kilomètres. Quand je demandais à ma mère de me faire une liste des raisons pour lesquelles il fallait que j'abandonne l'idée de tout planter là, elle me donnait, en mère aimante, tout plein de qualités qui me paraissaient énormes. Bien trop écormes pour que j'y croie. Un peu du genre « le père Noël t'apporteras une mercedes, 100 balles et un mars à la vanille ». Parmi elles, la sensibilité. J'étais un garçon manqué (selon moi, à l'époque, ça voulait dire fille (et encore) maladroite et imbécile), ma première histoire d'amour s'était mal terminée, je ne voulais plus entendre parler des mecs. Bien que ça ne m'empêchais pas de tomber amoureuse à nouveau, mais en silence cette fois. L'idée que j'avais de moi était entre la baleine poilue et le cendrier. En gros. Alors qu'on me parle de sensibilité, quelle blague! Je me rendai compte des années plus tard qu'elle avait bel et bien raison. Bref c'est à ce moment que j'érigeais en certitude ce que je clamais avec fierté depuis de nombreuses années déjà : jamais je ne passerai ma vie derrière un bureau à compter ou rédiger des courriers pourris pour un patron qui m'a embauché pour ma paire de guibolles. Mais ce n'est qu'au cours de cette discussion tard dans la nuit, que mon parcours s'expliquait à mes yeux : ce n'était pas par fierté que j'avais choisi le milieu du spectacle, ni par narcissisme, puisque je me trouve monstrueuse, ni encore par talent, puisque mes débuts sur scène étaient vraiment très mauvais. Je décidai de travailler dur, très dur même, pour quelque chose qui m'intéresserait et que j'aurais envie de faire. Cette décision était née d'un besoin.

    Je découvre maintenant que c'est par besoin que j'en suis là : un besoin impérieux de me prouver que je ne suis pas un grain de sable perdu sur la plage, un corps au milieu d'autres dans le métro, une suite de caractères dans la pile de Cvs. Besoin d'avoir une vie extra-ordinaire, et de chaque jour relever le défi, chaque jour pouvoir m'allonger en me disant que j'ai eu raison de continuer. Besoin d'être reconnue, de marquer les esprits, de savoir que j'ai signifié quelque chose pour quelqu'un aujourd'hui. Non, je ne ressemble ni à Florence Foresti, ni à Valérie Lemercier, ni à Romane Boringer, je ressemble à Marion J. et je vous emmerde. Un besoin de réacquérir chaque jour la certitude que j'ai eu raison de rester sur Terre. De là naît une exigence accrue envers soi-même : je ne me donne pas le droit d'être mauvaise, bête, maladroite. Le seul problème, c'est que j'ai, du coup, beaucoup de mal à considérer les gens qui se laissent aller. Je veux de l'exception, une vie-dynamite. Evidemment, vous pensez bien que l'exigence que j'ai envers moi-même m'interdit totalement de tricher. L'exta, c'est pas pour moi. Et si jamais j'en ai besoin pour « décoller », alors c'est que je n'ai plus rien à faire ici-bas et que j'ai râté.

    Voilà pourquoi j'ai une telle admiration pour les « monstres sacrés », ces êtres qui savent donner leur être dans toute leur originalité ; qui, pour la plupart, ont le mal de vivre, mais qui le dépassent toujours pour vous emmener dans les étoiles.

    J'aime ce "toi d'abord!"

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Commentaires
M
Oui je comprends mieux. Même si je constate chaque jour que dans mon métier, si t'as pas la foi en ce que tu fais... c'est la grosse merde. Vraiment. Après, j'ai passé un an dans une école de théâtre qui m'a beaucoup déplu mais je n'en retiens pas que des choses négatives, j'y ai appris de choses, parfois à mes dépens, et, surtout, je suis effectivement allée au bout de l'année parce que je m'étais engagée.
A
Pour t'aider à comprendre (mais bon tu ne fonctionnes pas comme ça, peut-être):tu commences à faire quelque chose parce qu'intellectuellement ça te paraît approprié ou judicieux; et puis au fur et à mesuer que le temps passe, tu t'aperçois de ce que cela t'a apporté. Je prends un exemple plus concret : tu fais partie d'un groupement d'inte^ret commun; tu y crois; puis tu n'y crois plus et ça te semble nul, faux, inutile; tu continues parce que tu t'es engagée et tu ne veux pas te d'sengager; tu continues parce que l'on te dit que si si tu fais des trucs super mais tu n'y crois pas; trois ans après, tu réalises le bien que ça t' a fait et ce que cela t'a apporté (pour exercer une activité très différente); et tu en demeures stupéfaite : que finalement des apports positifs (tu as appris des choses, tu t'es transformé) sortent de cette "m..." tu n'y aurais jamais cru. Je parle selon mon expérience.
M
Alfie : c'est très juste ce que tu dis. Effectivement on met des mots dessus, et même si c'est pas les bons, ça aide à passer outre. Après, c'est peut-être mieux de dire les bons, mais pour ça faut un speak-ologue.<br /> <br /> Antagonisme : pour moi, ta phrase ne me parle pas : si y'a pas d'espérance, y'a rien. Ni vie ni tentative de quoi que ce soit, parce qu'on ne fait rien si on pense que c'est voué à un échec certain. Enfin c'est ce que je pense. Et je trouve important de réussir des choses même minimes, c'est ça qui donne la foi de viser plus haut. Mais pour la fin de ton com, j'suis tout à fait d'accord!
A
Tu as raison et je partage ton point de vue. "Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer". je ne sais pas si c'est ce que tu essaies de dire, mais il faut en quelque sorte créer sa vie. Si tu veux faire quelque chose, accroche-toi à ça, même si ça semble fou, parce que c'est ce que tu aimes, et le fait d'essayer de le réaliser va te plaire, te rendre heureuse malgré les difficultés et donner un sens agréable à sa vie. Moi, je l'ai compris depuis peu. Pas possible de se laisser aller dans une vie pour des raisons raisonnables ou parce qu'on n'a pas le courage de prendre la voie que l'on veut. Après, on le regrette.
M
"Je découvre maintenant que c'est par besoin que j'en suis là : un besoin impérieux de me prouver que je ne suis pas un grain de sable perdu sur la plage, un corps au milieu d'autres dans le métro, une suite de caractères dans la pile de Cvs."<br /> Tiens donc, j'ai déjà cru lire ou entendre ça ! Et sans rire, je pense effectivement que dès lors que l'on a trouvé le truc, ce bidule qui fait vivre, ce machin derrière lequel courrir, peut-être inlassablement, mais avec détermination, chaque passage à vide reprend un sens...
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